On a voulu en savoir un peu plus en interrogeant Claude Picard, le boss du label.
Comment a commencé l’aventure Vinyl Vidi Vici / Cameleon Records ? C’est quoi la différence entre les deux labels ? Vous êtes combien dans l’équipe ?
Claude Picard – Je suis seul mais entouré de contributeurs sans qui le label n’existerait pas. VinylVidiVici est mon premier label mais je l’ai stoppé il y a longtemps. J’ai monté Cameleon à la place car je voulais rééditer des vinyles. Sortir des groupes actuels est un autre travail, que je ne connais pas.
Comment choisissez-vous les disques que vous aller publier ? comment trouvez-vous ces enregistrements qui ne sont jamais parus ?
Par coup de coeur, allié à la rareté et à la pertinence, c’est-à-dire le style musical et l’année. Je ne sortais pas d’inédits, je ne faisais que de la réédition au début, puis avec 38 Tonnes le groupe m’a envoyé 3 inédits qu’on a sorti avec un autre label avec lequel je collabore, Mémoire Neuve dont le travail un jour sera j’espère reconnu, il suffit d’écouter Les privés ou Bondage-T… Mon premier vrai disque avec des inédits sorti sur Cameleon ce sont Les Jerrys, un EP sixties uniquement disponible en acétate que Guy Gardon un fidèle du label m’a prêté. On me contacte souvent, on m’envoie des cassettes, des mp3. Je fouine et j’ai des potes collectionneurs… j’écoute plusieurs fois, ensuite je laisse reposer, puis je réécoute une semaine plus tard, histoire de ne pas me tromper. Soit je fais un disque du groupe, soit je mets de côté pour une compilation, c’est comme cela que j’ai sorti le coffret De La Pure Came avec 32 inédits. J’ai des contacts dans les villes comme Strasbourg, Bordeaux, Rouen, Rennes, Marseille, Tarbes, Grenoble ou Quimper avec Ty Blurt qui m’a passé un test pressing de STEW… ou mon pote Christian Tanguy qui m’a trouvé les Blue Shades inédits.
Vous avez deux actualités pour cette rentrée, Affection Place et Sealsia, vous pouvez-nous en dire un peu plus sur ces deux albums ? Comment vous les avez connus ?
J’avais déjà sorti les Rotters de Lyon. J’ai quelques contacts dans cette ville, plus des « amis » de Paris comme Nicolas Kantorowicz qui m’ont aiguillés sur plein de groupes. J’ai contacté, entre autres, Affection Place, Safety et Raison Pure. Les 3 possédaient des titres inédits, que j’ai édités en singles. Mais pour Affection Place, beaucoup de titres existaient, ce qui a servi à sortir le LP aujourd’hui. Pour Sealsia c’est mon ami belge René Debot qui m’a contacté , il avait l’unique acétate, idem pour le Robert Hincliffe, et aussi pour le prêt de sa copie du Didier Bocquet. Je suis allé voir les membres de Sealsia au printemps en vélo, histoire de lier mes 2 passions. Excellent accueil, et ils sont très contents aujourd’hui, un chef d’œuvre pour moi.
Vous avez un rythme de publication plutôt soutenu , ça ne devient pas difficile de trouver de nouveaux inédits ou d’albums rares à rééditer ? La concurrence n’est -elle pas un peu rude ?
C’est beaucoup de temps passé effectivement. Oui il y a beaucoup de rééditions aujourd’hui, mais à partir du moment que le groupe est au courant et OK, c’est tant mieux.
Je ne parle pas évidemment des rééditions à 10€ à la FNAC ou autre grandes enseignes qui plombent le marché des indépendants comme elles l’avaient fait il y a 25 ans. Les inédits intéressants, il y en a partout, les groupes français ont beaucoup enregistré des démos sur cassettes ou bandes, faut pas croire. La province n’est pas assez mise en avant, surtout pour le punk, Paris étant trop souvent le mètre étalon, ce qui est je pense totalement à revoir. Les groupes de province venaient jouer à Paris, parfois enregistrer , puis ils retournaient dans leur ville, parfois leur village ! Il y a là une histoire à écrire. Il y a des travaux actuellement, j’attends le résultat. Ma prochaine sortie est la compilation Thesaurus Volume 4 avec 17 groupes français et 28 inédits 1979-1984 de Strasbourg (merci à Eric ), Lyon (merci à Nicolas), Paris et sa banlieue (merci à tous), Lorient (merci à Fred)… En fait, je déroule la pelote, c’est untel qui connaît un gars qui jouait et qui a peut-être…
Je n’ai pas franchement de concurrence et personne ne sort un coffret vinyle avec 8 singles aujourd’hui !
Êtes-vous distribués chez les disquaires ?
J’emmène et j’envoie, je n’ai pas de distributeur officiel. J’ai juste des disquaires et des itinérants qui me prennent mes productions.
On est souvent étonné que vos disques partent un peu comme des petits pains et qu’ils soient rapidement “sold out”. On suppose que vous avez un public fidèle. Vous connaissez un peu vos « clients » ? Si oui, qui sont-ils ?
Je connais surtout des passionnés du vinyle et de la musique. J’en connais beaucoup, dans la vraie vie je veux dire. Moi aussi je suis étonné que cela parte vite, mais aussi quand cela ne se vend pas ! Toutefois, le label est une association loi 1901, je ne fais aucun bénéfice personnel sauf celui d’être content de sortir parfois des disques qui m’ont plu il y a trente ans ; je ne vis pas de ça, impossible à mon niveau.
Des projets à plus ou moins long terme ? Vous pensez diversifier l’offre avec des sous-labels ou rester dans votre créneau ?
Des projets, ce serait sortir à nouveau une compilation Thesaurus avec du sixties, mais c’est un travail très long, déjà retrouver les membres , les interviewer et écrire leur histoire, puis tout mettre sur mon site, ce qui me prend aussi beaucoup de temps. J’ai peut-être un projet pour un EP sixties, mais là aussi, il faut savoir attendre auprès des producteurs pour l’accord, je suis tout petit. Mon créneau c’est le punk, hard, prog, soul, sixties et quand j’ai sorti Margaret Freeman ou participé à la compilation B.C.G., on touche à un autre style, je n’ai pas vraiment de frontières hormis la pertinence. Sortir du street punk ou du hard de 1990 inédit m’intéresse pas, ou bien faudrait vraiment que ce soit de la bombe.
J’ai un autre tout petit label prestataire, MicrOvinyl, une sorte de Kiosque d’Orphée actuel, où les personnes souhaitent mettre sur un vinyle des enregistrements qu’ils ont fait il y a des années ou aujourd’hui, en 5 ou 300 exemplaires. C’est eux qui décident selon le prix qu’ils veulent mettre, totalement DIY.
Et vous personnellement, vous possédez combien de disques ?
Environ 25000. Si je rajoute ceux que je fais fabriquer, j’ai plus de place. Donc je vends un peu pour déstocker mes bacs vu que j’achète toujours un peu de nouveautés.
La rentrée de Cameleon Records
Sealsia – Sealsia (1976)
Il ne restait qu’un acétate abîmé de ce groupe folk psychédélique de Arles qui n’avait jamais été édité.
Parution le 9 octobre 2019
Affection Place – Affection Place
10 titres inédits d’ un groupe cold wave/post punk de Lyon, au début des années 80.