Il est des parutions de livres qui m’excitent et que pourtant j’appréhende. Lorsque j’ai vu sur les étals cette Anti Discothèque Idéale, d’un journaliste des Inrocks que je connais bien et apprécie par ailleurs, Christophe Conte, je l’ai scrutée d’un regard anxieux. Encore une anthologie des disques oubliés qui vient piétiner sur les plates bandes de ce site ! Puis : encore des disques à découvrir, chouette !
Cepedant on pouvait se demander s’il ne s’agissait pas là d’une resucée de l’excellent Rock, Pop, Un Itinéraire bis en 140 albums essentiels de Philippe Robert, de dix ans son ainé. Philippe Robert ayant aussi écrit dans Les Inrocks.
De fait, pour qui est un lecteur assidu des critiques musicales de l’hebdomadaire, on n’est pas surpris par certains choix de cette anthologie. En 2003 était déjà sorti un hors série sur les Trésors Cachés du Rock, hors série qui fut l’impulsion première qui a amené à ce site une dizaine d’années plus tard. C’est pourquoi nous retrouvons quelques albums chroniqués ici, ceux de Pete Dello, The Outsiders, Billy Nicholls ou encore The Aerovons, et quelques autres qui allaient l’être.
Mais revenons sur l’ouvrage, bien présenté, dont les 100 « chefs d’oeuvre » oubliés parcourent 5 décennies. Un zoom est fait sur Ram de Paul McCartney, ce qui en soi est tout à fait justifié. Seulement, Ram n’est plus vraiment oublié depuis que les Inrocks, justement, l’ont réhabilité il y a une quinzaine d’années et le font encore régulièrement. Il était d’ailleurs présent dans le livre de Philippe Robert sus cité. Un autre éclairage est porté sur Pacific Ocean Blue de Dennis Wilson, dont le cd est fourni avec le livre. Plus confidentiel que Ram, cet album de l’ex Beach Boys a néanmoins bénéficié d’une très bonne couverture (notamment, encore une fois dans les Inrocks) lors de sa réédition.
De même, l’on retrouve quelques albums cités partout dès que l’on parle de trésors cachés : Dashiell Hedayatt, Lee Hazlewood, Linda Perhacs, Bill Fay… Reste que cette anthologie promet pour un amateur de belles découvertes, les articles sont, de plus, bien écrits, fournit assez d’informations pour donner envie d’écouter et ne tombe pas dans le piège de l’érudition. Ce qui, en soi, est déjà une réussite.
Christophe Conte l’annonce dans sa préface, son choix d’albums est totalement subjectif, voire de mauvaise foi. Et on ne peut que lui donner raison d’avoir agi ainsi. On n’est toutefois assez dubitatif sur les choix opérés sur les deux dernières décennies. Non que les albums chroniqués ne fussent pas bon, mais ils sont pour la plupart, loin d’être oubliés. Fiona Apple, Thinderstick, Midlake, Yo la tengo, PJ Harvey, Elliot Smith… pour ne citer qu’eux, il faut vraiment n’avoir écouté qu’NRJ pour ne pas avoir entendu parler d’eux… Le pompon est sur le choix du dernier album. Conte dit dans sa préface qu’il a voulu présenter des albums qui ne se retrouvaient pas dans les autres top, et clôt son ouvrage par Carrie & Lowell de Sufjan Steven… qui se retrouve à peu près dans tous les tops 2015 ! (On saluera néanmoins tout aussi subjectivement pour avoir cité Swing Lo Magellan de Dirty Projectors)
L’anti Discothèque idéale est une anthologie indispensable pour les novices, mais aussi pour les acharnés qui, de toute manière, ne peuvent s’empêcher de lire ce genre de livre, soit pour trouver de nouvelles perles rares, soit, pour tout simplement lire la discographie sélective d’un passionné. On l’aurait peut-être voulu plus ramassé sur les années 60-80, là où Christophe Conte semble le plus à même à nous faire découvrir de belles choses inconnues…
Parmi les découvertes :
The Key –Fit me In
Emmanuelle Parrenin – Maison Rose
Franco Battiato – Fetus
A lire aussi : Guy Darol – 80 francs-tireurs du rock et de ses environs
L’anti discothèque idéale, 100 chefs d’oeuvre auxquels vous avez échappé ! de Christophe Conte
Préface de Bernard Lenoir
GM Editions, 144 pages
Comprend le CD Pacific Ocean Blue de Dennis Wilson
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